Le 15 octobre dernier, nous avons eu le plaisir d’aller à la rencontre de la FNEP – Fédération Nationale des Ecoles de Production. Une belle occasion de mettre en lumière ce dispositif ingénieux permettant d’accompagner des jeunes en décrochage scolaire vers des qualifications professionnelles recherchées par les entreprises ! Nous vous proposons un tour d’horizon, suite à un échange passionnant avec Dominique Hiesse, Président de la FNEP.
La FNEP en bref : une fédération de 35 écoles, avec une croissance explosive depuis 5 ans
La première Ecole de Production existe depuis 1882 – les 27 dernières ont été créées sur les 10 dernières années.
Depuis 2018, le statut d’Ecole de Production a été reconnu par l’Etat, dans le cadre de la loi liberté avenir professionnel.
Les écoles sont implantées sur toute la France, en zone rurale (25%) comme en zone urbaine (dont 50% dans des Quartiers Prioritaires de la Ville).
Les secteurs d’activité concernés sont : - L’industrie : mécanique d’usinage, chaudronnerie, textile - Le BTP : menuiserie bois et alu, métallerie, construction bois, charpente - La réparation automobile : mécanique, carrosserie - Le maraîchage et les travaux paysagers - Les métiers de bouche, restauration et service en salle - L'électricité
Le modèle économique de la FNEP s’appuie sur les cotisations des membres adhérents, la collecte de 13% de la taxe d’apprentissage auprès des entreprises et le soutien de fondations privées familiales ou d’entreprise.
Les écoles sont indépendantes, et sont fédérées par la FNEP sur la base d’un modèle commun et sur un socle de principes fondamentaux qui forment l’ossature d’un label « Ecole de Production ». La fédération propose des outils (ex livret de suivi des apprentissage) que les écoles sont libres d’utiliser dans le respect de certains Fondamentaux. Des audits sont donc régulièrement réalisés pour s’assurer de la mise en œuvre de la pédagogie particulière des Ecoles de Production : « Faire pour apprendre ».
Concrètement, qu’est-ce que c’est une Ecole de Production ?
L’Ecole de Production est un hybride entre le lycée professionnel et le CFA : - Comme dans un lycée professionnel, tous les élèves se retrouvent dans un seul lieu. - Comme dans un CFA, les entreprises sont intégrées à l’Ecole
Les jeunes sont sous statut scolaire, et ont entre 15-18 ans. Les écoles sont privées et hors contrat, sans but lucratif et comptent de 25 à 130 élèves, avec en moyenne 40 à 45 jeunes. Les jeunes passent deux tiers de leur temps en atelier à s’exercer sur de vraies commandes pour de vrais clients, et lors du tiers restant leur est prodigué un enseignement général et normé.
La formation qu’ils suivent est diplômante, du CAP au bac pro. Les classes comptent des effectifs réduits (de 8 à 12 élèves), ce qui garantit un suivi de proximité des jeunes. La scolarité y est généralement gratuite, bien que certaines écoles demandent une participation symbolique du jeune. Pour les Ecoles de production en milieu rural, une solution d’internat peut être proposée.
Comment confirmer la réussite de ces dispositifs ?
Les résultats parlent d’eux-mêmes : Une moyenne de 94% de réussite aux diplômes sur l’ensemble des écoles de production et 100% d’insertion en entreprise en sortie d’école, la moitié en apprentissage pour continuer une formation, l’autre moitié en CDI ou CDD pour un premier emploi qualifié et une bonne rémunération.
Quelles sont les conditions pour pouvoir créer une Ecole de production ?
3 piliers doivent être sécurisés : - Confirmation d’un public cible présent sur le territoire : des jeunes en grande difficulté scolaire, voire décrochage - Mobilisation d’entreprises partie prenante de l’école : il s’agit d’identifier des entreprises qui vont se mobiliser pour confier de la prestation aux Ecoles de Production et ainsi permettre la formation en « conditions réelles » des jeunes. Il n’y a pas d’engagement de recrutement, mais globalement les jeunes n’ont aucune difficulté à trouver de l’emploi en sortie d’Ecole (ils ont jusqu’à 4 à 5 propositions en général) - Mobilisation du territoire pour le projet (Conseils Régionaux, agglomérations, communautés de communes)
Pour créer une Ecole de Production, il s’agit ensuite de solliciter la FNEP pour être « labellisé ». Chaque Ecole de production étant une association indépendante, la FNEP propose des outils et une méthodologie, et libre à l’association de les utiliser.
Cependant le label « Ecole de Production » est soumis au respect de 8 principes fondamentaux : 1/ L’ouverture à tous les jeunes dès 15 ans 2/ Une approche pédagogique clairement éducative, au service du jeune dans son ensemble 3/ La formation à un métier avec un objectif d’excellence 4/ Une pédagogie partant de la pratique pour aller à la théorie (« faire pour apprendre ») 5/ Un volume significatif de production destiné à la vente aux conditions réelles du marché 6/ Pratique et théorie en alternance au même endroit dans la même semaine 7/ 60% du temps de formation du jeune en situation de production 8/ Une association indépendante à vocation scolaire, ou à défaut un comité de pilotage spécifique, et une comptabilité spécifique et certifiée
Quel est le modèle économique d’une Ecole de Production ?
Une grande variété d’acteurs sont sollicités afin de garantir un modèle économique solide. Les financements sont globalement répartis de la façon suivante : - 30% de financements par la Région, - 27% par l’Etat, - 11% proviennent de la taxe d’apprentissage ; - 12% proviennes des dons/subvention/scolarité ; - 20% en moyenne de financement associé à la production réalisée par les jeunes en formation (marge brute sur production vendue)
L’activité économique est 100% réservée à la pratique des jeunes dans le cadre de leur formation : les écoles de production ne produisent pas à côté pour des entreprises et ne laissent pas les élèves produire pour leur propre compte. En vendant sa production au prix du marché, l’objectif premier d’une Ecole de Production n’est pas économique, même si cette vente est nécessaire à l’équilibre d’exploitation de l’école. Le but est de mettre le jeune en condition réelle, ce qui le motive, le responsabilise et valorise les compétences qu’il acquiert en ayant la reconnaissance d’un client avec les mêmes exigences qu’avec un autre fournisseur. C’est aussi de créer du lien avec les entreprises et donner aux jeunes de la visibilité sur les passerelles emplois envisageables.
L’ambition du réseau est bien de répondre aux immenses attentes des 100 000 jeunes et de leurs familles qui quittent chaque année toute formation en sortie de 3ème (après le collège) et nourrissent un public de 1,5 à 2 millions de jeunes de 15 à 30 ans sans emploi ni formation (Neets). L’ambition est également de répondre aux attentes des entreprises souffrant de la pénurie de personnels qualifiés et des territoires soucieux du développement socio-économique. Pour cela, la FNEP veille à l’adaptation continue du modèle pédagogique avec une ambition forte en termes de qualité et d’ouverture au plus grand nombre.
L’histoire des Ecoles de Production leur permet de s’appuyer sur un réseau d’entreprises partenaires fidèles, avec des relations de long terme, qui sont majoritairement des TPME, bien que de grands groupes industriels ont également renforcé le tissu depuis quelques années.
Plus de 80% des écoles sont gratuites, l’un des principaux fondamentaux étant de garantir l’accessibilité de la formation à tous. La participation demandée par certaines écoles relève du symbolique et non pas une réelle participation aux frais.
Zoom sur le parcours d’un jeune au sein d’une Ecole de production
Les Ecoles de production travaillent avec les CIO (Centre d’Information et d’Orientation) des collèges, les Clubs sportifs, et se mobilisent lors de stages de 3ème pour donner de la visibilité à leurs dispositifs et identifier les jeunes.
Les Ecoles de production disposent à la fois d’un atelier de production in situ et de salles de cours, pour garantir une formation diplômante aux jeunes.
Un livret de suivi des apprentissages théoriques et de production (les apprentissages liés aux commandes/productions réalisées) est mis en place pour chaque jeune. Il y a une vraie logique de parcours d’apprentissage individualisé.
Quasiment toutes les Ecoles de Production fonctionnent par promotion (accueil jusqu’à la Toussaint généralement, pour être en capacité d’accueillir les jeunes qui ont un souci d’orientation à la rentrée scolaire.) : certaines écoles font 2 rentrées, mais aucune des écoles n’est sur une logique d’entrées/sorties permanentes.
La FNEP dispose d’un fonds de solidarité pour accompagner plus spécifiquement les jeunes avec des problématiques sociales à lever.
L’encadrement est clé dans la réussite de ce dispositif : qu’est ce qui est prévu pour identifier, former et accompagner les formateurs ?
Les Ecoles de production s’appuient en effet beaucoup sur les maîtres professionnels qui accompagnent les jeunes pour incarner au quotidien l’esprit « Ecole de Production ».
Un certain nombre de maîtres formateurs des Ecoles de production avec une certaine ancienneté sont d’anciens élèves.
Avec le développement récent des Ecoles de Production, la FNEP a développé une structure de formation pour les maîtres formateurs des écoles de production récentes, notamment par le biais d’immersions au sein des écoles plus anciennes et expérimentées.
Cet Organisme de Formation, certifié Datadock, est rattaché à la fédération, au service ces écoles de production et il est financé par des subventions et des mécènes.
L’équipe SocialCOBizz www.socialcobizz.com